La Poupée d'Azur ft.Elisabeth Stormwood

Elle danse, encore et encore...

Durant le nettoyage minutieux de son appartement, il allait et venait devant sa fenêtre. Mais rien. Il ne la voyait pas. Dans le bâtiment en face, séparé par une simple ruelle, il pouvait apercevoir l'appartement voisin. Aucune activité ou présence pouvaient être vues, l'endroit semblait vide. Cela l'agaçait. En y pensant, il se disait qu'il avait dû la rater et cela l'agaçait encore plus.

C'était une demoiselle qui habitait dans cet appartement, outre le fait que sa peau était d'une couleur bleue, elle ressemblait en tout point à un être humain comme lui. Quand il la voyait, il ne pouvait pas s'empêcher de se dire que ce bleu lui allait parfaitement bien et que, finalement, la voir avec une couleur de peau normale serait étrange... Ce qu'il préférait le plus dans la journée, c'était la voir danser. Tous ces gestes étaient faits avec élégance et légèreté. Il pourrait la regarder danser durant des heures, même si ce n'était que des simples entraînements.

Elle s'appelait Elisabeth Stormwood, mais il aimait la surnommer Mademoiselle Azuré ou tout simplement la Poupée d'Azur. Elle devait à peut-être avoir la vingtaine, mais les femmes n'ont pas d'âge de toute manière, elles restaient belles et jeunes éternellement. Il savait aussi qu'elle travaillait dans un café et qu'elle prend des cours de danse, parfois, il l'accompagnait dans ces lieux... Il l'accompagnait de loin bien sûr. Qu'est-ce qu'il tuerait pour la regarder danser durant ces cours. Ne serait-ce que pour la voir de plus près ou de la toucher, sa peau devait être très douce... Mais cela serait un véritable sacrilège d'oser effleurer une grande Étoile comme elle.

Car il n'y avait pas de doute à avoir, pour lui, elle serait la grande danseuse Étoile. Elle n'était que perfection et Espérance aimait la perfection. Alors il sera son admirateur, le plus grand et e plus fidèle qu'elle n'aura jamais connu. Il la suivra partout, charmé par chaque représentation qu'elle fera, surveillant ces moindres faits et geste. Chassera les êtres malveillants qui oseront, par simple jalousie, de lui faire du mal, car il était évident que les gens seraient jaloux d'une telle personne.

Oui, Espérance l’idolâtrait beaucoup et ça en devenait presque effrayant lorsqu'on savait que la demoiselle en question n'était au courant de rien. Il faut dire que les seules fois où ils se voyaient, c'était lorsqu'ils rentraient ou sortaient, tout à fait par hasard, de leur lieu de domicile. Ou encore, lorsque le jeune se rendait au fameux café où elle travaillait, au point d'en devenir un client régulier.

Normalement, lorsqu'il voyait qu'elle s’apprêtait à partir, il se préparait aussi pour la suivre et savoir où elle va aller. Mais là, il l'avait raté et il avait encore un peu de mal avec l'emploi du temps de la jeune femme et le sien... Surtout qu'il pouvait y avoir des imprévus comme un congé, tomber malade ou visite chez quelqu'un. N'ayant pas d'autre choix que de partir à sa recherche, il enfila une veste et sortit dehors.

Le vent souffla son air, l'hiver était toujours là, mais le corps chaud et le sang bouillant le protégeaient du froid. Le programme était simple, d'abord acheter un bouquet de fleurs, de saison bien entendu. Son choix se portera pour des magnifiques Camélia, accompagné d'une petite carte où il écrit de sa plus belle plume et comme à chaque fois, il attendra que le facteur passe dans le bâtiment où elle résidait. Il en profitera pour y entrer, allant déposer cette offrande à sa porte et d'en ressortir aussi vite qu'il était entré.

Une fois, cela fait, il se rendit au fameux café. En passant devant la vitrine, le regard flamboyant du jeune homme parcourrait l'endroit cherchant la dulcinée. Impossible de rater une Étoile bleutée, travaillant, insouciante du danger qui l'observait derrière la vitre. Quelques pas de plus et il était à l'intérieur. Il s'installa à sa place habituelle, il allait prendre une tarte aux pommes, avec un bon chocolat chaud viennois. Espérance attendit alors qu'un serveur vînt prendre sa commande, son regard posé sur la Poupée d'Azur, il espérait de tout cœur que se soit elle qui allait venir.

Elle danse, encore et encore...

Elle était là, juste devant lui. Le calepin et le crayon à la main, prête à noter la commande du jeune homme. Comme une étoile aussi étincelante pouvait se retrouver si basse ? Cela faisait peine à voir de la trouver dans ce pauvre café. Le regard d'Espérance parcourra les lieux, pensif, il n'y avait que des personnes mal réveillées, qui devaient être désagréable, le genre de personne qui n'aimait pas être dérangé et qui devaient avoir impérativement leur café pour se mettre au travail. Le genre de lieu qu'Espérance n'aimait pas vraiment côtoyer, mais si cela permettait d'admirer de prêt la charmante demoiselle, alors ça en valait la peine de faire un effort.

« Un chocolat chaud s'il vous plaît, viennois si possible. Avec des cookies en accompagnement. »

Son regard bleu se posa sur la jeune femme, elle notait sur son petit calepin la commande. Le crayon tenu entre les doigts fins d'une main délicate, il glissait sur le papier comme une danse, avec fluidité et grâce. Puis elle s'éloigna pour apporter la commande, ses pas résonnaient dans le café, entre les commérages certains et les râles des autres. De l'autre côté de la vitre, des passants faisaient des allers-retours sur les trottoirs, vacant tranquillement à leur occupation ou rejoignant péniblement leur travail. Rien de bien intéressant, de l'ennui, rien que de l'ennui. Comme cet endroit.

Quelque chose traversa son esprit alors qu'il parcourra de nouveau le café, regardant les clients, les employés, le patron et la demoiselle d'azur. Il aimerait avoir un peu plus qu'un simple échange de paroles avec elle, avoir une véritable discutions afin que son statut envers elle gravit les échelons, ne plus être ce énième client qui venait et qui repartait, ne plus être ce voisin qui dit bonjour et bonsoir. Acceptera-t-elle ne serais que de boire une boisson avec lui . Encore faudrait-il qu'il ose lui proposer et si elle refuse, il engagera le dialogue autrement pour ne pas perdre son attention. Il avait plus d'un tour dans son sac et donc de divers sujet de conversations qui pourrait plaire à la demoiselle, si elle se daignait à accepter de faire la conversation.

Tout n'était que question de préparation. Ne pas paraître bizarre au risque de la faire fuir, bien préparer sa phrase, être polie et galant. Chose qu'Espérance savait très bien faire. Choisir les bons mots, cela pouvait avoir son importance. Des pas se rapprochaient, cela allait être bientôt le moment. Son regard ne pu s'empêcher de quitter la vitre pour se glisser sur la demoiselle bleutée. Le petit chocolat avec les accompagnements fut déposé sur la table. Le jeune homme devait prendre la parole, vite, avant qu'elle ne s’échappe encore une fois.

« Désirez-vous faire une petite pause dans votre laborieux travail et boire quelque chose en ma compagnie ? Je vous offre la boisson et les accompagnements que vous désirez. »

Il marqua une pause, pour laisser le temps à la demoiselle de réfléchir et aussi d'examiner cette délicieuse boisson qui n'attendait qu'à être dégusté. Espérance allait attendre encore un peu avant de boire, comme c'était trop chaud, les boissons sont toujours trop chaudes de toute manière. Et histoire d'essayer de convaincre un peu plus la jeune femme, il reprit.

« Je vous vois tous les jours travailler si dur dans ce café, vous méritez bien une petite pause et discuter tranquillement. Votre patron le fait bien avec certains clients à ce que j'ai pu remarquer. »

Il la regarde de nouveau, encore, son regard ne faisait que ça, se balader autour de lui, mais tel un aimant, il était attiré par la présence de la jeune fille. S'en détaché était plus que difficile, la voir d'aussi prêt... Aussi proches, sa présence, son parfum, sa peau qui était sans doute douce à porter de main. Il n'y avait plus de ruelles qui les séparait, ni de bâtiment, ni de porte, ni de vitre. Il fallait en profiter le plus possible.